Voici un bel hommage rendu par sa famille à notre ami Jacques…
« Si je me souviens bien…
Pauline Pesqué, la petite fille qu’on voit sur le daguerréotype, a épousé, après avoir un peu grandi, Victor Pataa. Pauline et Victor ont eu une fille qui s’appelait Laurence, qui a épousé Jean Carrassus. Laurence Pataa et Jean Carrasus ont eu Suzanne. A son tour, Suzanne a épousé grand-père qui ne s’appelait pas encore grand-père, mais Jean Magendie. Ses parents étaient Philippe Magendie et je dirais Marie Jouambon. Mais, je n’en suis pas tout à fait sûre.
Ce qui est sûr c’est que Grand-père, Jean Magendie donc, et Suzanne Carassus que nous aurions appelée Grand-mère si nous l’avions connue, ont eu un premier enfant et c’était toi, Jacques, le premier des trois frères Magendie.
Toi, qui bien plus tard, allais nous raconter toutes ces histoires de famille. Tu vois, il en reste un peu quelque chose, un petit quelque chose approximatif.
Nous n’avons pas vraiment fait l’effort d’en retenir davantage. A quoi bon, tu étais là pour raconter et raconter encore. Tu étais notre mémoire.
Il faut dire que de la mémoire tu en avais à revendre. Aujourd’hui quand on se pose une question, on cherche sur internet. Avant, il n’y avait pas internet, mais nous avions quand même les réponses à nos questions. On t’avait toi, Jacques et c’était bien mieux, parce que maintenant tout le monde a accès à internet, alors que des oncles comme toi, on n’était pas nombreux à en avoir.
Quand on ne trouvait pas de réponses à nos questions, on appelait Jacques, et Jacques savait.
Ça nous faisait rire, toi aussi d’ailleurs, et on était fier d’avoir un oncle qui savait tout. Comme si on y était pour quelque chose…
Tu n’es plus là et nous avons perdu notre mémoire. Nous avons manqué de vigilance. Il faut dire que tu rêvais tellement d’être centenaire qu’on a fini par croire que tu y arriverais. Alors nous pensions qu’il nous restait un peu de temps pour reprendre avec toi de fil de l’histoire et mieux connaître la tienne.
Ta mort nous a pris de court. Tu es parti sans qu’on ait le temps de te dire combien tu as compté pour nous et pas seulement parce que tu savais tout.
Tu nous as fait rêver avec les récits et les photos des voyages que tu faisais avec Pierre, à une époque où les gens ne partaient pas encore.
Nous avons admiré ton engagement syndical et la ferveur avec laquelle tu défendais tes convictions politiques, face à grand-père notamment.
Nous t’avons aimé pour ta gentillesse et ton humilité
Et nous savons que nous aussi nous avons compté pour toi. Les milliers de photos que tu as prises de nous en témoignent.
Une deuxième date est maintenant inscrite sous ton nom dans l’arbre généalogique. Tu as rejoint les disparus, ceux que l’on n’a pas connus et ceux que l’on a connus et chéris.
Alors c’est à nous à présent de raconter l’histoire, ton histoire.
Il était une fois Jacques Magendie.
L’histoire pourrait commencer ainsi :
Jacques Magendie était un être à part, un être extra-ordinaire. C’était notre oncle et nous l’aimions… »
« Jeudi dernier, dans la clarté du soleil, Jacques tournait lentement la dernière page du livre de sa vie.
Une vie tournée vers Jésus-Christ en qui il avait mis toute sa foi.
Une vie tournée vers Marie qu’il priait, égrenant son chapelet, le jour comme la nuit quand il ne dormait pas.
Une vie partagée avec sa famille, avec ses amis, ses compagnons d’hier et d’aujourd’hui et avec tous les voisins qu’il croisait en chemin.
Une vie tel un beau livre relié dans lequel chacun pourrait y trouver son nom. Tous ces noms que Jacques n’oubliait pas !
Une vie tel un livre épais jalonné de longs et passionnants chapitres. Si Jacques les avait écrits, quels titres aurait-il choisis ? Et voilà que je me surprends à imaginer les titres de certains chapitres
- Ma mère est morte, je n’ai que 5 ans
- Mes années de collège à Nay, sous l’occupation
- A quinze ans, ma folie du livre
- L’appel au sacerdoce ; questionnements ; j’ai 23 ans
- Mes autres passions : le cinéma et la photo
- Mon entrée aux PTT
- Le syndicalisme, un engagement de toute une vie
- Retour à Lescar, rue Maubec. J’ai 59 ans.
- Mon père
- Derrière les murs de ma maison, il y a …
- Imaginons qu’il ait écrit ce livre. L’écriture est petite et fine, à peine lisible.
Les mots sont rugueux, parfois tranchants quand la voix éclate, quand la douleur surgit.
Mais ils sont si joyeux quand, entouré de sa famille, Jacques souffle ses bougies d’anniversaire ou quand à Noël, il arrive à Mérignac les bras chargés de livres, en criant à chaque fois, au bas de l’escalier « coucou, c’est Jacques »
Les mots sont toujours affectueux, quand il évoque vos noms, vos lettres, vos coups de fil, vos rencontres, vos discussions et vos partages.
Merci d’être venus, aujourd’hui, et parfois de très loin, à la cathédrale de Lescar que Jacques a tant fait visiter. Merci d’être là pour lui dire toute votre amitié et votre affection.
Merci de l’avoir aimé.
Si Jacques avait rédigé le grand livre de sa vie, il n’aurait pas écrit le mot fin, car une autre vie l’attend.
Une vie de lumière et d’espérance à laquelle il croyait. Puisse-t-il trouver de l’autre côté du rivage le bonheur auquel il aspirait. »
